Da Libération del 18/11/2005
Originale su http://www.liberation.fr/page.php?Article=339321
Leopoldo Elia, juriste, critique la réforme de la Constitution approuvée par le Sénat
«Un risque pour la cohésion de l'Italie»
di Eric Jozsef
Rome - Au lendemain de l'approbation définitive par le sénat italien d'une profonde réforme de la Constitution dans un sens fédéral, l'ancien président de la Cour constitutionnelle, le juriste Leopoldo Elia, proche de l'opposition de gauche, dénonce «de grands risques pour la cohésion nationale» de la péninsule. Fortement voulu par le mouvement autonomiste de la Ligue du Nord, le texte prévoit un renforcement du pouvoir des régions et du rôle du chef du gouvernement.
En quoi cette réforme est-elle dangereuse pour l'avenir du pays?
«C'est un texte qui porte à la dissociation du pays et qui désarticule les institutions. La réforme affirme d'un côté que la santé ou l'éducation sont de la compétence exclusive de l'Etat et de l'autre que, désormais, l'organisation scolaire et sanitaire est également de la compétence exclusive des régions. Tout dépendra donc à l'avenir de l'interprétation de cette exclusivité. On peut imaginer qu'une majorité politique conditionnée par la Ligue du Nord donnera une interprétation totalement favorable aux régions.»
Mais l'Italie va-t-elle dans la direction d'une sécession de la riche «Padanie» (Nord) et d'un abandon du Mezzogiorno (Sud) comme le réclamait la Ligue du Nord?
«Il ne s'agit plus d'une sécession déclarée mais d'une sécession implicite. Si les lois régionales finissent par avoir la primauté sur les décisions prises au niveau national, on assistera à un fossé encore plus grand entre les conditions de vie dans les différentes régions d'Italie. La réforme permet également des modifications de la carte administrative du pays, uniquement sur la base de référendums locaux. Ainsi une quarantaine de communes de la région de Vénétie pourraient, comme elles le souhaitent déjà, rejoindre une autre région, celle du Trentin-Haut-Adige, nettement plus riche. Cette réforme est vraiment dangereuse, d'autant qu'elle modifie aussi la forme du gouvernement.»
N'était-il tout de même pas nécessaire de réformer la Constitution italienne, qui n'a pratiquement pas bougé depuis la guerre?
«Il y a eu, à la fin des années 90, une tentative de moderniser la Constitution de manière consensuelle à travers une commission parlementaire. Mais Silvio Berlusconi a mis fin au dialogue entre les partis. La réforme qu'il vient de faire approuver par sa seule majorité présente une vision complètement contradictoire. D'un côté, elle est ultra-fédérale, et de l'autre, elle imprime une poussée centraliste très forte avec l'accroissement démesuré des pouvoirs du chef du gouvernement. La réforme concentre en effet tout le pouvoir dans les mains du Premier ministre, qui peut notamment dissoudre la Chambre des députés. Il devient intouchable pendant cinq ans.»
Un référendum populaire peut-il bloquer l'entrée en vigueur de cette réforme constitutionnelle?
«La Constitution prévoit qu'une telle réforme peut être soumise à référendum populaire si elle n'a pas été approuvée au Parlement par la majorité des deux tiers, ce qui est le cas. L'opposition a déjà annoncé qu'elle proposera un tel référendum. Il faut espérer qu'il soit approuvé pour ne pas rompre l'unité de l'Italie.»
En quoi cette réforme est-elle dangereuse pour l'avenir du pays?
«C'est un texte qui porte à la dissociation du pays et qui désarticule les institutions. La réforme affirme d'un côté que la santé ou l'éducation sont de la compétence exclusive de l'Etat et de l'autre que, désormais, l'organisation scolaire et sanitaire est également de la compétence exclusive des régions. Tout dépendra donc à l'avenir de l'interprétation de cette exclusivité. On peut imaginer qu'une majorité politique conditionnée par la Ligue du Nord donnera une interprétation totalement favorable aux régions.»
Mais l'Italie va-t-elle dans la direction d'une sécession de la riche «Padanie» (Nord) et d'un abandon du Mezzogiorno (Sud) comme le réclamait la Ligue du Nord?
«Il ne s'agit plus d'une sécession déclarée mais d'une sécession implicite. Si les lois régionales finissent par avoir la primauté sur les décisions prises au niveau national, on assistera à un fossé encore plus grand entre les conditions de vie dans les différentes régions d'Italie. La réforme permet également des modifications de la carte administrative du pays, uniquement sur la base de référendums locaux. Ainsi une quarantaine de communes de la région de Vénétie pourraient, comme elles le souhaitent déjà, rejoindre une autre région, celle du Trentin-Haut-Adige, nettement plus riche. Cette réforme est vraiment dangereuse, d'autant qu'elle modifie aussi la forme du gouvernement.»
N'était-il tout de même pas nécessaire de réformer la Constitution italienne, qui n'a pratiquement pas bougé depuis la guerre?
«Il y a eu, à la fin des années 90, une tentative de moderniser la Constitution de manière consensuelle à travers une commission parlementaire. Mais Silvio Berlusconi a mis fin au dialogue entre les partis. La réforme qu'il vient de faire approuver par sa seule majorité présente une vision complètement contradictoire. D'un côté, elle est ultra-fédérale, et de l'autre, elle imprime une poussée centraliste très forte avec l'accroissement démesuré des pouvoirs du chef du gouvernement. La réforme concentre en effet tout le pouvoir dans les mains du Premier ministre, qui peut notamment dissoudre la Chambre des députés. Il devient intouchable pendant cinq ans.»
Un référendum populaire peut-il bloquer l'entrée en vigueur de cette réforme constitutionnelle?
«La Constitution prévoit qu'une telle réforme peut être soumise à référendum populaire si elle n'a pas été approuvée au Parlement par la majorité des deux tiers, ce qui est le cas. L'opposition a déjà annoncé qu'elle proposera un tel référendum. Il faut espérer qu'il soit approuvé pour ne pas rompre l'unité de l'Italie.»
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